dimanche 4 mars 2018

DOUCE AMÈRE - Théâtre des Bouffes Parisiens

PORTRAIT DE FEMME
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QUAND LE COUPLE S’ÉRODE

Après 8 ans de vie commune le couple de Philippe et d'Elizabeth est usé. Elle l'a aimé, n'ai plus trop sûre de l'aimer encore. Il l'aime toujours mais pourrait-il la laisser partir quand bien même il la pousse dans les bras de Michel. Bras dans lesquels Elizabeth refuse tout d'abord de tomber, préférant succomber aux charmes de Stéphane, coureur automobile, puis de Gilles, jeune homme fougueux avant de revenir vers Michel puis de sombrer dans la solitude.

UN VAUDEVILLE MÉLANCOLIQUE

Après le succès de " La cage aux folles" Jean Poiret surprenait public et critiques avec cette comédie acide sur le couple. Un vaudeville certes, avec le mari, la femme et ses amants. Mais un vaudeville mélancolique et vénéneux, et un peu bavard pour ne pas dire parfois verbeux. Michel Fau, à la demande de Nicolas Poiret, a ressorti ce texte écrit d'une plume féroce.

Dans un magnifique décor des années 70, aux lumières psychédéliques, tout en rondeurs  avec ses œilletons en trois dimensions, son socle tournant, sa balustrade, ses trappes, Mélanie Doutey traîne son mal-être de femme en quête d'attention ou d'identité. Michel Fau ouvre le bal avec un dialogue où les bons mots se succèdent, lui permettant de nous ravir de sa fantaisie. Sous le sarcasme on sent poindre les tourments de l'amoureux qui sent la femme qu'il aime lui échapper. Les répliques fusent avant qu'il ne laisse la place à la quête d'Elizabeth. 


UNE FEMME MODERNE

Mélanie Doutey se fait femme moderne, en quête d'indépendance intellectuelle et sentimentale. Elle fait face au cynisme de Philippe, minaude avec son amant sportif, se veut dominatrice et enfantine avec le jeune Gilles, indécise avec Michel. Elle explore avec finesse les différentes facettes de cette femme tourmentée qui navigue entre amour charnel, amour platonique, amour fantasmé et amour intellectualisé et fait de ce texte une pièce très actuelle.

Si Michel Fau impose sa présence dans la première partie de la pièce, la seconde partie traîne un peu en longueur. Les noirs permettant les changements de décor sont à rallonge pour laisser le temps à Mélanie Doutey de changer de costume, ce qui a tendance à casser le rythme que le texte a parfois alourdi. David Kammenos (Stéphane), Christophe Paou (Michel) et Rémy Laquittant (Gilles) n'ont pas le charisme de Michel Fau et le texte ne les met pas vraiment en avant. Mais malgré ces quelques défauts la pièce garde son intérêt pour le portrait de cette femme forte, fragile et moderne, et pour la qualité des dialogues caustiques et drôles, Jean Poiret jouant la carte du non-dit, des mots voilés. 

Une mention particulière pour la bande son constituée de différentes versions de "Comme d'habitude". Rythmant l'enchaînement des scènes elles illustrent à la perfection la déliquescence de ce couple qui s'est tant aimé.

En bref : Michel Fau reprend un texte caustique de Jean Poiret, dans une mise en scène sophistiquée, permettant à Mélanie Doutey une composition fine et subtile. Un vaudeville mélancolique et psychédélique qui n'est pas exempt de défauts mais qui dresse le portrait complexe d'une femme en quête d'amour.

Douce amère, de Jean Poiret, mise en scène de Michel Fau, avec Michel Fau, Mélanie Doutey, David Kammenos, Christophe Paou, Rémy Laquittant, décors Bernard Fau et Natacha Markoff, lumières Joël Fabing, costumes David Belugou

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
4 Rue Monsigny 75002 Paris
Du 16 janvier au 22 avril 2018
Du mardi au samedi 21h - matinées samedi 16h30 et dimanche 15h


Vu Février 2018 - Théâtre des Bouffes Parisiens

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