mercredi 1 novembre 2017

AU BUT

FABULEUSE DOMINIQUE VALADIE
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Une mère et sa fille. Elles viennent d'assister à une pièce de théâtre d'un jeune auteur auquel est promis un beau futur (Thomas Bernhard lui-même ?). La fille a aimé, la mère aussi et se surprend à inviter le jeune homme à partager leur retraite balnéaire, pour aussitôt regretter cet élan de générosité. Car cela ne lui ressemble pas. Ou peut-être que si. Car la mère n'est finalement que contradictions. Elle rumine son mariage avec un mari défunt qui ne présentait semble-t-il pour seul intérêt que de posséder une fonderie, ce qui faisait de lui un notable. Mais pour le reste cette bourgeoise aigrie qui passe son temps à ruminer sa rancœur contre la vie, ne semble avoir de plaisir que dans le fait de martyriser sa fille.

C'est un quasi-monologue qu'écrit Thomas Bernhard. En tailleur de laine couleur caramel et chemisier lavallière, Dominique Valadié incarne admirablement cette femme insatisfaite, tyrannique, qui a fait de sa dévouée fille son souffre-douleur. La première partie est un huis clos fusionnel entre les deux femmes, animé par la longue logorrhée de cette mère devenue monstre, tentant depuis toujours de détruire cette seule enfant qui lui reste, la vie lui ayant "heureusement" enlevé très tôt un garçon malade, se plaignant à longueur de temps de la vacuité de la vie et de l'absurdité de la condition humaine.

Et malgré tous ses efforts pour être désagréable on ne peut détester cette femme dont on sent dans le discours parfois contradictoire toutes les blessures non guéries, les douleurs toujours vives, les désillusions à fleur de peau. Elle qui croyait avoir vaincu son destin de fille illégitime en épousant un bourgeois n'a même pas pu s'accomplir dans la maternité, entre ce fils anormal et cette fille laide. Car au fond dans cette entreprise de destruction du seul entourage qui lui reste n'est-ce pas elle-même qu'elle veut diminuer. Sa fille si maltraitée semble néanmoins imperméable à ce sadisme permanent. 

Discrète mais omniprésente la fille, Léna Bréban, fait face avec douceur et dignité. Dans la courte seconde partie l'auteur (Yannick Morzelle), apporte la caution théâtrale, incarnant le proverbe que le mari semble-t-il répétait à tout-va "tout est bien qui finit bien".

En bref : Dans ce magnifique décor de bois, dans un style Art déco, Dominique Valadié transcende un texte qui sans sa prestation magistrale pourrait être très aride voire assommant.

Au but, de Thomas Bernhard, mise en scène Christophe Perton, avec Dominique Valadié, Léna Bréban, Yannick Morzelle, Manuela Beltran

C'EST OU ? C'EST QUAND ?
75 Boulevard du Montparnasse 75006 Paris
Du 9 septembre au 5 novembre 2017
Du mardi au samedi 21h Dimanche 15h

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